J'ai pris connaissance de cette piste en effectuant des recherches sur les excursions en Guyane française. "Molokoi signifie "tortue de terre". Cela me convient bien, vu mon rythme de randonnée ! J'avais remarqué avec étonnement que la majorité des sentiers de randonnée en Guyane étaient très courts, 2 à 4 km maximum, ce qui contraste complètement avec ce que nous connaissons en France métropolitaine. Je n'avais pas d'explication claire à cela : végétation impénétrable ? Difficultés de balisage ? Une faune envahissante et donc trop dangereuse ? La chaleur et l'humidité limitant les randonnées plus longues ? Pour nous rassurer, les réservations des lodges insistaient partout sur la prudence : randonner à deux, ne pas s'écarter du sentier principal, si un arbre bloque le chemin, une seule personne le contourne, et au pied de l'arbre (certains font 40 mètres de haut, donc pas facile à contourner avec la végétation dense) pour éviter de se perdre au milieu de nulle part. Du point de vue de la France métropolitaine, tout cela me paraissait bien inquiétant. Aussi, lorsque j'ai appris l'existence du sentier Molokoi, 18 km à travers la forêt tropicale avec un arrêt presque inévitable à 11,5 km pour dormir dans un abri, j'ai pensé que l'occasion était trop belle pour la laisser passer. Mais une inquiétude persistante m'habitait. J'ai donc regardé quelques vidéos sur YouTube pour évaluer la situation. Il y en avait en fait très peu, 3 ou 4. À travers les vidéos, il était évident que la situation était difficile, mais les raisons exactes n'étaient pas claires.

Cette préparation par les vidéos s'est cependant avérée cruciale car nous sommes partis parfaitement équipés, en suivant les recommandations des guides locaux. Je vous conseille de toujours le faire lorsque vous partez un peu plus loin que l'Auvergne. Les multiples visites à "Au vieux campeur" (un magasin d'équipement de plein air) et les commandes en ligne pour du matériel spécifique ont été salvatrices. Parfois, je me disais "tu exagères un peu" : une machette ? Pour dégager le chemin dans les zones où la nature a repris ses droits ? Non, il faut bien l'entretenir ! Une gourde filtrante pour l'eau de la rivière ? Après tout, nous aurons assez d'eau pour 2 jours dans nos sacs ! Un poncho pour nous protéger, nous et nos sacs, des pluies tropicales ? Mais enfin, il ne va pas pleuvoir ! On est au mois d'août ! Des lampes frontales ? C'est tout simplement ridicule ! 11,5 km ! On va arriver avant la nuit ! Bon, je les prendrai quand même puisqu'ils recommandent de les avoir. Juste des idées de citadins déconnectés de la réalité locale.

Comment l'exprimer ?

La Guyane n'est pas la France métropolitaine ! Les excursions n'ont rien à voir avec celles des Alpes ou des Pyrénées où l'on trouve des réseaux un peu partout. Ici, il fait constamment 32 degrés Celsius (89,6 degrés Fahrenheit). Le moindre effort vous fait perdre des litres d'eau. Nous sommes partis avec 3,5 litres chacun dans nos sacs. Cela ne nous a permis de tenir que jusqu'à la moitié du voyage. Sans la bouteille d'eau filtrante, nous aurions été en difficulté. Les crampes étaient déjà bien présentes, mais là, ça aurait été le comble ! Les lampes frontales : sans elles, nous avons été obligés de nous arrêter en pleine jungle, loin de l'abri, et d'installer nos hamacs avec des moustiquaires au milieu de nulle part, en attendant la lumière du jour. Dans la forêt tropicale, il fait nuit à partir de 18 heures... Les grands arbres bloquent la lumière du jour.

Quand je repense à toutes les choses que j'ai hésité à emporter et qui se sont avérées absolument indispensables, j'en ai des frissons. Tout cela nous a permis de transformer ce qui aurait pu être un cauchemar en une magnifique expérience dans la forêt tropicale où nous ne nous sommes jamais sentis en danger. Nous étions épuisés, nous avions des crampes partout, nous avions le dos en compote (10 kg sur le dos, ce n'est pas facile dans ces conditions), mais nous étions heureux.

Hormis cette planification qui m'a passablement occupé l'esprit, une fois que nous étions sur le sentier et que nous savions que nous étions bien équipés, nous nous sommes sentis à l'aise. Cependant, les nombreux dénivelés le long du sentier ont rendu le voyage difficile, tant en montée (cardio) qu'en descente (glissades). Le sac à dos de 10 kg n'a pas aidé, surtout au fil des kilomètres lorsque la fatigue s'est installée. Les crampes étaient toujours sous-jacentes, voire bien présentes, mais j'avais des barres de sels minéraux pour les contrer (achetées en métropole). L'atmosphère était incroyable, les bruits d'insectes (surtout les cigales locales qui sonnent un peu comme une guimbarde), et les oiseaux qui gazouillent en permanence, sauf quand il se met à pleuvoir. Les paysages étaient magnifiques, avec des ruisseaux occasionnels nous permettant de nous rafraîchir et de nettoyer la boue de nos chaussures (et plus) puisqu'elle était présente tout au long du chemin (même si c'était censé être la saison sèche). La fin du premier jour a été très difficile avec l'arrivée d'une pluie tropicale qui a ralenti notre progression car le sol devenait extrêmement glissant. Il était hors de question de tomber et de se blesser. Il était impossible de contacter qui que ce soit (pas de signal pendant 20 km), et nous ne croisions quasiment personne sur le sentier. Il fallait donc bien réfléchir à chaque étape. Nous avons fini par utiliser les lampes frontales... Impressionnant quand on est dans la forêt tropicale, seul, et sous la pluie.

En arrivant au refuge, nous rencontrons un autre randonneur qui semble surpris de nous voir arriver à cette heure-là (nous sommes partis bien trop tard le matin : 11h30, alors que tout le monde part vers 9-9h30 au maximum). Nous avons échangé des anecdotes sur la randonnée, la route du Cacao le lendemain, la Guyane... le tout à la lumière de nos lampes frontales. Un beau moment d'échange !

Nous avons ensuite installé nos hamacs (beaucoup de rires !) et nous avons dormi d'un sommeil quelque peu réparateur.

Le lendemain semblait simple : 7 km contre 11,5 km la veille, mais c'était sans compter la fatigue musculaire accumulée et le manque d'entraînement... (pour moi, car mon fils s'entraînait pour le marathon de Paris).

La fin a donc été aussi complexe que le début, mais les nombreuses criques nous ont redonné courage et fraîcheur.

En arrivant à Cacao, je pensais bêtement que la première voiture s'arrêterait pour nous ramener à notre voiture 26 km plus loin, là où nous nous étions garés au début de la piste, au lieu-dit Coralie. J'ignorais aussi que l'auto-stop à la lisière de la forêt tropicale est difficile. Les voitures sont parfois piégées par de faux auto-stoppeurs ! Nous ne le savions pas... Après 45 minutes d'efforts, nous n'avons pas trouvé de voiture. Et la tombée de la nuit approchait à nouveau... Fatigue, encore ! !! Il n'était pas question de marcher les 26 km supplémentaires après ce que nous avions déjà enduré... J'ai donc approché quelques ouvriers qui remballaient leur matériel, semblant quitter Cacao pour rentrer chez eux dans leur camion.

Nous avons expliqué la situation et ils nous ont gentiment ramenés à notre voiture ! Alléluia ! Plus tard, ils nous ont dit qu'il nous aurait été très difficile de trouver un véhicule pour faire de l'auto-stop sur le bord de la route. Ici, à la lisière de la forêt amazonienne, de faux auto-stoppeurs se positionnent pour faire arrêter les voitures, puis des groupes armés et cachés dans la forêt tendent des embuscades aux véhicules et aux conducteurs une fois qu'ils se sont arrêtés. Comme les conducteurs ne peuvent pas savoir s'ils sont seuls et bien intentionnés, personne ne s'arrête ! Nous aurions donc pu finir par faire les 26 km à pied, dans le noir...

Morale de l'histoire : nous ne prendrons pas d'auto-stoppeurs !!! Désolé, les gars.

Bref, ce fut une expérience magnifique, épuisante (je n'ai pas l'endurance de 22 ans de mon fils, qui a géré le voyage bien plus facilement que moi, faute d'entraînement), mais nous l'avons fait, ensemble, avec son lot de difficultés, de fatigue, voire d'épuisement (pour moi), mais aussi de beaux souvenirs de cette expérience unique qui resteront gravés dans nos mémoires à tout jamais. C'était une expérience à la fois physique et humaine.

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2 réponses

  1. Bonjour Corinne et Anthony,

    Quelle belle aventure que vous vivez. Vous êtes vraiment courageux.
    Merci de nous faire partager cette aventure incroyable en pleine forêt d'Amazonie.
    Hâte de voir vos photos.
    Bonne fin de vacances de découvertes.

    Prenez soin de vous

    Bises à tous les 2

    Béatrice

    • Merci Béatrice ! Il y a encore tant de choses à dire... Sur les animaux, la faune, la vie ici et l'histoire de la Guyane ! !!
      Regarde notre article sur Les Bagnes en Guyane. C'est un passé sombre de la France que je ne connaissais que très peu à travers Dreyfus, Seznec et Papillon
      Bises
      Corinne et Anthony

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